Les fondamentaux de makesense

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8 min readNov 29, 2019

Makesense va bientôt fêter son 10ème anniversaire. Nous avons grandi vite, par tâtonnements et dans plusieurs directions. Cela va sans dire que nombreux sont ceux qui se sont sentis perdus face aux méandres de notre organisation protéiforme et expérimentale. Nous commençons nous-même à y voir un peu plus clair grâce aux travaux réalisés autour des parcours d’engagement, de la mesure d’impact, de notre identité et de notre modèle de gouvernance. Par-delà la multiplicité de points de vue de nos 70 employé·es dans 7 pays, des 120 000 citoyen·nes engagé·es dans 200 villes , la diversité d’activités ou de parcours des 2500 entrepreneurs et entrepreneuses accompagné·es, nous sommes aujourd’hui en mesure de vous partager les fondamentaux élaborés ensemble sur qui nous sommes et ce à quoi nous voulons contribuer.

Il aura fallu d’abord s’accorder sur un DIAGNOSTIC sur le monde qui nous entoure, peu reluisant mais pas désespérant, car nous sommes porté·es par une VISION d’un monde futur qui serait à la fois possible et désirable. Nous pensons pouvoir contribuer au fait que ce monde advienne grâce à des changements systémiques profonds ; c’est la MISSION que nous nous sommes donnée et nous nous y attelons en respectant au mieux des VALEURS au sein de notre ORGANISATION. Nous nous référons à des THÉORIES pour établir une STRATÉGIE ambitieuse que nous adaptons en PLAN D’ACTION chaque année selon le contexte, nos métiers et nos régions.

DIAGNOSTIC

  • La civilisation industrielle a entraîné le dépassement de 4 des 9 plafonds critiques de sécurité environnementale. Parmi eux, le dérèglement climatique, déjà observable, tend à s’aggraver, voir à s’emballer (pas très zéro déchet tout ça). Pour Petteri Taalas, même la stricte mise en oeuvre des engagements pris par les Etats durant la COP21 ne suffira pas à maintenir le réchauffement en dessous de 2°C. On ne va pas se mentir, ça sent le roussi !
  • Les structures de pouvoir restent majoritairement organisées selon des modèles de prédation et d’accumulation matérielle qui ne profitent qu’aux plus nantis. Selon OXFAM, 26 personnes possèdent autant que la moitié de l’humanité et les 10% les plus riches sont responsables de 50% des émissions de CO2.
  • L’individualisme, la compétition et le consumérisme participent au délitement de la solidarité, des actions collectives et de la préservation des biens communs :
Nous vivons actuellement une “tragédie des communs” alors que d’autres modèles existent

La multiplicité des problèmes sociétaux, leur ampleur et leur urgence pourraient amener à détourner les yeux, à sombrer dans le cynisme, le nihilisme ou le défaitisme mais nous percevons des éléments encourageants :

  • Des solutions existent : nul besoin de fantasmer une énième technologie miracle, des femmes et des hommes ont su à différentes échelles et dans différents contextes mettre ensemble en place des réponses sociétales adaptées, accessibles, durables, conviviales qui pourraient grandir, essaimer et nous inspirer;
  • Beaucoup de personnes ont envie d’agir et de trouver un sens. Elles se sentent paumé·es ou en colère, comprennent que cette société ne « tourne pas rond » mais ne savent pas par où ni comment commencer.

VISION

Martin Luther King avait un rêve, certes ambitieux, indubitablement lointain et d’ailleurs toujours pas réalisé, mais envisageable et motivant, capable de fédérer par-delà sa personne, par-delà ses choix stratégiques. Notre rêve chez makesense, le monde dans lequel nous aimerions vivre, bref ce que nous appelons notre VISION c’est un monde durable et inclusif, où l’on s’engage ensemble à faire société. On ne va pas nier les problèmes ou sortir les violons mais plutôt illustrer par quelques exemples précis :

  • On aime la coopérative d’infirmier·es Burtzorg citée dans Reinventing Organizations parcque les gens qui y travaillent peuvent librement s’adonner à leur vocation de prendre soin des autres.
  • On aime les solutions Low Tech racontées dans Watt If parce qu’elle sont sobres et conviviales : au Sénégal, des communauté rurales répondent à leurs besoins primaires en transformant elles-mêmes une plante “invasive” en combustible écologique bon marché.
  • On aime les justes raconté·es dans les films WAYNAK ou Libre qui accueillent et accompagnent les personnes exilées chassées par la guerre et la misère.
Des solutions qui répondent à la fois aux enjeux de fin du monde et de fin du mois existent

MISSION

On ne va clairement pas y arriver seul·es, et d’ailleurs nous n’avons aucunement cette prétention. Nous sommes très heureux·ses de nous articuler avec des personnes et organisations partageant notre VISION et dont les actions et missions sont complémentaires aux nôtres, comme Tous élus, Le LowTechLab, Disco Soupe ou Ticket for Change. Notre MISSION à nous est :

« Inspirer et outiller des citoyen·nes, entrepreneur·euses et organisations afin que nous construisions ensemble une société plus durable et inclusive »

La manière qui nous est apparue la plus efficiente pour faire que notre VISION advienne est de servir de déclencheur et d’effet levier pour que nos 3 cibles poussent leur engagement plus loin par delà les échelles et catégories conventionnelles:

1/ Comprendre les grands défis de notre monde et s’inspirer localement pour avoir envie d’agir

2/ Rencontrer et soutenir des personnes passionnées pour imaginer des actions collectives

3/ Créer des solutions concrètes et développer des compétences nécessaires pour les mettre en oeuvre

4/ Mobiliser et collaborer pour réunir les forces de chacun·e vers des objectifs communs

VALEURS

Cette mission, nous avons une manière bien à nous de nous y atteler, c’est à la fois notre ingrédient mystère qui colore nos événements, une posture que l’on cultive et que l’on espère faire rayonner, une boussole qui guide nos actions au quotidien. Ce sont nos VALEURS qui se formulent différemment selon que l’on soit salarié·e ou membre de la communauté même si l’on retrouve les mêmes principes :

  • Les expériences dans la vie réelle priment, même si elles peuvent être aidées par du digital.
  • La frugalité (plutôt que la “sobriété”, qui laisserait supposer qu’on ne boit jamais d’alcool) est le meilleur moyen de préserver les ressources et de créer du lien.
  • La joie de faire ensemble des actions qui ont du sens avec un certain sens de l’humour.
  • L’audace de tester et de contribuer.
  • La curiosité d’apprendre.
  • La bienveillance pour créer un climat de confiance.

Soit dit en passant, on a vraiment envie de progresser sur l’humilité, l’accessibilité et l’inclusion. Si on intervient à un événement et que l’on arrive à ne prononcer aucun des mots suivants : faites nous signe, on débouche le champagne (ou plutôt le cidre… c’est moins cher, il y a des producteurs bio, et ça existe en vrac)

extrait du livre Stagiaires : le guide de survie de Samantha Bailly.

ORGANISATION

Je vois un sourire narquois poindre au coin de vos lèvres après avoir lu cet enchevêtrement de mots clefs digne d’un post Instagram, et vous avez raison d’être perplexe : nous avons énormément fait évoluer notre gouvernance et notre modèle légal mais nous sommes loin d’être parfait·es, ! Nous mettons en œuvre au sein de notre ORGANISATION (qui regroupe des communautés locales, thématiques, des associations et entreprises à impact) des moyens concrets pour lier le geste à la parole :

  • Une gouvernance partagée est mise en place depuis 2017. Chacun·e est libre de prendre toute décision pourvu d’avoir consulté les personnes impactées, chacun·e peut s’opposer à une décision qu’il·elle jugerait dangereuse pour l’intégrité de notre organisation. L’organe qui vient arbitrer en cas de conflit non résolu ou de situation urgente est composée de 5 personnes dont un·e bénévole, toutes élues lors d’une élection sans candidat
  • Notre modèle de rémunération est construit indépendamment du poste ou du cursus scolaire et valorise l’expérience et le niveau auto-estimé d’implication. L’écart de rémunération entre les salariés ne dépasse pas 1 à 3 (ce qui n’inclut pas les stagiaires et services civiques, sujet sur lequel on réfléchit aussi).
  • De nombreuses formations internes visent à transmettre les outils de la Communication Non Violente, la culture du Feedback ( zut, on a utilisé un mot anglais).
  • Nous travaillons actuellement sur un outil qui permettra de décider ensemble avec quel·les client·es et dans quelles conditions, nous acceptons de travailler.
  • Grâce au Carillon, nos locaux à Bastille sont ouverts aux personnes sans-abri qui veulent prendre un café, aller aux toilettes ou recharger leur téléphone.
Caroline a participé à la mue de l’organisation

THÉORIES

Ça y est, on a un point de départ et un horizon à atteindre… Bon, entre les deux, il y a quand même pas mal d’étapes et puisque l’on n’a pas de boule de cristal, on se réfère à des théories et à nos intuitions pour imaginer des scénarios probables :

  • Des recherches montrent que si 10% d’une population bascule dans un nouveau paradigme, un seuil est atteint qui permettrait de changer la société en profondeur. C’est discutable (d’ailleurs c’est discuté) mais c’est possible et pour ne rien gâcher, ce chiffre nous semble être un objectif atteignable !
  • Nous pensons que les communautés locales ou thématiques, telles que nous les définissons, sont des outils qui permettent d’articuler les transformations individuelles et sociétales que nous appelons de nos vœux
  • Nous croyons que les entrepreneur·ses à impact sont une des clefs pour apporter des réponses aux défis sociétaux et environnementaux, tant pour composer avec le monde tel qu’il est que pour construire un monde tel qu’il devrait être.

STRATÉGIE

Voilà, maintenant que vous savez tout, qui on est et où nous voulons aller, vous devriez comprendre notre ambition pour 2030 qui est de toucher 10% d’une classe d’âge, en proposant des formations, des expériences et des accompagnements tellement riches et utiles que les citoyen·es, entrepreneur·ses ou collaborateur·ices qui en bénéficient en parlent autour d’elleux et que cela fasse effet boule de neige, et que tout le monde s’engage plus loin et développe plein de relations et de savoir-être, et que du coup plein de solutions conviviales soient adoptées partout dans le monde, et que tout le monde est trop content·e (même les générations futures) un café et d’addition sivouplait

(suspendu, bio, et équitable pour le café et l’addition en mode zéro déchet avec l’arrondi pour Emmaüs)

Dans les faits on est encore très très loin du but, on est bientôt 80 employé·es, des milliers de volontaires, on n’habite pas dans le même pays, on ne s’adresse pas aux mêmes publics et on ne sait pas faire les mêmes choses, donc tous les ans on actualise le DIAGNOSTIC et les THÉORIES, on s’assure qu’on est encore aligné·es sur la VISION, la MISSION, la STRATÉGIE et les VALEURS et on adapte notre ORGANISATION pour construire au sein de nos équipes les PLANS D’ACTION adaptés. D’ailleurs si vous avez des choses à nous dire, que vous avez envie de participer aux débats, on vous encourage à commenter cet article ou à en parler à notre comité de communauté.

ALLER PLUS LOIN

De nombreux récits sous différents formats viendront sublimer, illustrer et étayer ces fondamentaux par des visages en tous genre et des péripéties au quatre coins du monde. Ce sont ces récits-là qui vous feront vibrer, que vous voudrez partager autour de vous car ils parleront de gens qui vous ressemblent et de problématiques qui vous touchent. Ce texte-ci, a pour but de rappeler que chacun de ces récits est une des nombreuses facettes d’un ensemble pluriel, cohérent, coloré, corrélé et ambitieux : makesense.

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makesense

makesense est une communauté internationale de citoyens, d’entrepreneurs et d’organisations qui résolvent ensemble les défis sociaux et environnementaux